Récemment, suite à un tweet de Sarah, je suis tombé sur un web-documentaire de 30 minutes extrêmement (c’est un euphémisme) bien réalisé. Le projet Happy World : Birmanie, la culture de l’absurde mené de front par Gaël Bordier et Tristan Mendès France, nous plonge en plein coeur d’un pays corrompu aux lois incohérentes.
Je vous propose de découvrir tout de suite le film !
Hormis une réalisation proche de la perfection, l’histoire est saisissante, prenante et par dessus tout engagée et passionnée. Tout y est : le dynamisme, l’infiltration, la narration, l’enquête poussée, et en ce sens je tire un énorme chapeau à nos deux reporters partis sur le terrain. Impressionné, je me suis empressé de les contacter pour leur poser quelques questions…
Un grand merci à eux pour leur temps que j’imagine compté !
Vous êtes partis sur le terrain à deux ! J’imagine que cela vient d’une passion commune pour le reportage et le voyage, mais comment vous connaissez-vous à la base ?
Nous nous sommes rencontrés grâce à Pierre Cattan (Cinquieme Etage Production) qui est un ami de longue date. Je cherchais à convaincre des producteurs de l’intérêt du sujet. Ce qui n’était pas facile vues les particularités du projet. Pierre fut le seul à m’accorder sa confiance. Très vite, il m’a mis en contact avec un réalisateur Gael Bordier qu’il pensait convenir à ce genre de tournage difficile. Baroudeur, sérieux, appliqué, il était the right man at the right place.
Des dictatures de nos jours, il en existe quelques unes ! Comment vous est venu l’idée de partir en Birmanie ?
Cela fait des années que la Junte birmane m’intrigue. En 2008, j’avais blogué le musée de la drogue que je devais visiter l’année suivante. Le kitch absurde de ce musée, ses grandes fresques montrant des généraux à cheval luttant contre la drogue, m’étaient apparues comme un symptôme de quelque chose de plus profond. Et c’est ce qu’on a creusé sur place. Ce quelque chose, c’était l’absurde.
Tristan, tu voyages de façon très engagée depuis quelques années via blogtrotters.fr. Au de la de la sensibilisation du grand public que tu prônes, quel est le but personnel qui se cache derrière tout ça ?
C’est en fait assez simple et banal. J’essaye comme je peux de donner un sens à ma vie.
Combien de temps a t’il été nécessaire pour boucler ce projet « Happy World » de A à Z ?
C’est difficile à estimer, je dirais de un à deux ans. Il a fallu coordonner de nombreux savoirs-faire hétéroclites et orchestrer des acteurs de secteurs d’activités très différentes. Pierre Cattan et Alexandre Brachet d’Upian, ont réussit cette délicate symbiose à merveille.
Le régime Birman contrôle visiblement tout. Avez-vous eu des problèmes durant le tournage ? Avez-vous senti à un moment que cela aurait pu mal tourner pour vous ?
À quelques reprises, franchement oui. Même si on savait aussi qu’on risquait infiniment moins que les opposants birmans sur place. Au pire je pense qu’on nous aurait expulsé du pays, avec quelques jours en prison, on aurait aussi pu se faire tenir en respect avec une kalach sous le nez pendant des heures, comme c’est arrivé à un ami journaliste.
Pour rentrer un tout petit peu plus dans le débat liée à la dictature installée depuis des lustres en Birmanie à Myanmar (oups !), j’ai été choqué de prendre connaissance de tous ces faits tous autant sidérants les uns que les autres. Si le pays et son peuple est visiblement entre les mains de grands malades (je pense peser mes mots !), ce genre de reportage à le mérite de nous ouvrir un peu plus les yeux, et nous permettre une fois de plus de relativiser sur nos situations respectives.
Amis voyageurs, si vous souhaitez découvrir le pays (attention, les autorités ne délivrent plus de visas à l’arrivée depuis Septembre 2010 – étonnant !), je vous invite à découvrir les conseils de l’ambassade (et aussi à regarder ce film deux fois !).
14 réponses à “Birmanie : la culture de l’absurde”
Super film, édifiant…C’est une abberation, vivement la Birmanie libre!
Absoluement incroyable! Bravo pour ton blog, ton expérience et bravo à Gael et Tristan pour ce reportage.
Reportage incroyable ! Une réalité que j’ignorais.
Super reportage, bien réaliste sur la situation au Myanmar.
Malgré cette situation y aller c’est recevoir énormément de la part de ce peuple oppressé. Je n’ai jamais vu autant de sourires et de gentillesse que pendant mes 3 semaines passées là-bas ! Bien sûr, il faut y aller en connaissance de cause et éviter au maximum de donner de l’argent à la junte. Il y a des moyens de l’éviter.
J’apporte un petit complément sur l’obtention du visa : il s’obtient en 3/4 jours à l’ambassade du Myanmar à Bangkok. La Thaïlande est un passage obligé pour se rendre au Myanmar, ce pays n’étant atteignable que par avion, histoire de contrôler les entrées et les sorties… ça se saurait si la junte était sympa !
Wow, sur le cul tout au long du film.Merci a des gens comme eux (et toi) de nous donner des petites piqûres de rappel…
Et dire qu’il y a des pays démocratiques qui se sentent opprimés par leur gouvernement !
Et maintenant j’ai cette Pu### de chanson dans la tête…Beautifuuuuul Myanmaaaar 🙁 🙁
Superbe reportage, qui est d’ailleurs encore enrichi par son site qui le rend interactif !
Excellent! Beau projet!
Un grand merci pour ce reportage très intéressant et qui nous ouvre les yeux! Je savais ce qu’il se passait en Corée du Nord, mais j’ignorais totalement la dictature birmane. Quel courage d’y être allé, et d’avoir réalisé ce reportage si émouvant. Bravo!
@ Nicolas : Malheureusement, quelque chose me di que c’est pas demain la veille…
@ morgane : Ravi qu’il t’ait plu autant qu’à moi 🙂
@ Simon : Je n’étais pas loin de l’ignorance non plus 🙂
@ Adeline : Merci pour ton ressenti et le partage de ton expérience ! Ce film permet en effet d’y aller un minimum averti.
@ Yo : C’est clair que ça calme…
@ Maxime : Ils n’ont pas fait les choses à moitié, c’est sûr !
@ fabrice : 🙂
@ nelly : Bravo à eux encore une fois oui !
Ma femme est birmane.
Lorsque j’etais en thailande avec elle, j’ai cotoyé la communauté birmane exilé à Chiangmai. J’ai rencontré des tas de birmans, qui pour la plupart avait séjourné en prison de nombreuses années, certains parce qu’ils avaient hébergé une personne qui avait des pensées politique, d’autre juste parce qu’ils peignaient… Souvent, ils étaient assis à une table et rigolaient comme des fous. Ne comprenant pas le birman, je demandais la raison de ses rires. Ils mettaient en avant justement l’absurdité de la junte au pouvoir. J’ai trouvé ça incroyable. Ils avaient passés de nombreuse années en prison, et ils arrivaient encore à en rire ( même si on pouvait voir sur leur visage, un passé douloureux ).
Le documentaire est excellent, montre l’incroyable absurdité, on en rigole, mais n’oublions pas la gravité de la situation là bas. Dans ce pays, de nombreuse générations n’ont pas connu la paix, la liberté. Il y a des milliers d’espions de partout, rendant les birmans méfiant, parfois paranoïaque. Ma femme a longtemps cru que j’étais un espion ! J’ai eu un accident de voiture il y a quelques années avec de longues et belle cicatrices. Il a mis ça sur le fait que j’ai du faire la guerre ou quelque chose dans ce style ! Bref, il y a une veritable misère et détresse, même si de nombreux birmans sont arrivé à relativiser et se contenter du moment présent. Mon questionnement est le suivant : si jamais, un jour, la démocratie arrive en Birmanie, que la liberté soit enfin réel, que va t’il se passer ? Comment vont se comporter les birmans de cette liberté ? Comment le mal qu’il leur a été fait va t’il pouvoir se resorber ? Combien de générations faudra t’il pour guérir les traumatismes si un jour cela est possible. Bref, j’ose espérer qu’un jour ce magnifique pays pourra retrouver sa liberté, et que son peuple trouvera les ressources nécessaire pour la caresser avec sagesse….
@ franck : Merci Franck pour avoir pris le temps de nous éclairer de ton avis sur la question, qui insiste à juste titre sur le côté sombre de toute cette mascarade. Ton raisonnement me fait aussi penser à ce qu’il peut se passer par exemple en Chine avec la censure. Comment donner accès à toute l’information d’un seul coup sans risquer le chaos dans le pays ? Un sacré paquet de questions sans réponses…
Documentaire intéressant.
La situation depuis la parution de ce montage a légèrement évolué.
La Birmanie, aujourd’hui appelée officiellement Myanmar, même si ce n’est pas encore le paradis sur terre pour les opposants politique, à fait de gros effort, pour s’accorder au minimum avec la vision que les occidentaux ont de la gestion d’un pays.
Ca a d’ailleurs vallu la visite de Barack Obama. Si vous êtes intéressé par le sujet voici un article intéressant sur la visite de Barack Obama en Birmanie http://www.voyagesenbirmanie.com/blog-president-obama-visite-la-birmanie-550/